mercredi 13 juin 2012

Petit cours sur la suggestion

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Pierre Janet (1859-1947)


Avant-propos : 
 
Il y a deux sortes d'influence à distinguer :
- action : inciter une personne à faire quelque chose en pensant qu'elle le fait de sa propre décision.
- représentation : influencer (sur le coup ou par avance) la façon dont une personne pense, ou va comprendre, interpréter, apprécier, ressentir quelque chose.

Les deux formes d'influence peuvent être liées puisqu'on peut passer par l'une pour parvenir à l'autre et que l'une comme l'autre peuvent passer par le fait d'influencer les croyances d'une personne, se attentes, etc...

Cependant il y a bien une différence notoire :

Si je dis à une personne « Ne pensez surtout pas à un bateau rose qui flotte dans le ciel ». En m'entendant prononcer ces mots, la personne ne peut pas ne pas se représenter un bateau rose qui flotte dans le ciel, surtout si je ne le dis pas trop vite. Elle y pensera à coup sûr. Le verbe « penser » renvoie à une représentation, et c'est une chose bien difficilement contrôlable volontairement. Qui n'a pas joué à évoquer des plats succulents pour faire saliver un ami qui vient de dire qu'il avait très faim ?

En revanche, si je dis à une personne « Ne me paye surtout pas un verre. » Il y a des chances que je meure de soif avant qu'elle décide, par esprit de contradiction de m'offrir un verre. C'est une action contrôlable, et la personne peut tout-à-fait facilement décider de le faire ou non. Commander à l'action de quelqu'un est une influence possible mais qui demande plus de subtilité et de discrétion dans la formulation. On privilégiera les suggestions indirectes et imperceptibles (subliminales).

C'est donc à l'influence des représentations que nous allons nous intéresser ici et non pas des actions.

Encore un détail important : dans un état ordinaire de conscience, la suggestion n'est pas une commande à laquelle on ne peut pas résister, c'est juste une nuance qui vise à influencer, mais qui n'est pas sûre de réussir. C'est pourquoi, en général, on combine diverses suggestions entre elles pour augmenter les chances de succès. L'efficacité de la suggestion dépend de beaucoup de paramètres extérieurs, et la même suggestion n'aura pas la même efficacité sur des personnes différentes, à des moments différents, prononcées de façons différentes, ou par des personnes différentes.

Nous ne traiterons pas ici de la suggestion dans un état d'hypnose ou dans un autre état altéré puisque alors les règles sont bien différentes. Il s'agit simplement ici de la suggestion dans la communication ordinaire, dans une relation normale, dans un état normal. 

 
Propos :

Prenons donc une expérience simple :

Je tends un seau d'eau tiède à une personne. Je veux qu'elle mette la main dans le seau et qu'elle trouve que l'eau est chaude. Pour qu'elle mette la main dans le seau, je vais simplement le lui demander.
Mais pour qu'elle trouve l'eau chaude alors qu'elle est parfaitement tiède, il faut que j'use de suggestions afin d'influencer son appréciation.

Voici donc une liste de formulations (quelques exemples seulement) suivies d'un petit commentaire sur leur pertinence dans cette expérience :

1. affirmation
  • L'eau est chaude
en anglais statement, affirmation. Jugement. Ca n'est pas une suggestion mais une pure affirmation. Le fait d'exprimer aussi sèchement mon opinion pourra influencer l'autre tout de même si nous sommes dans une relation où j'ai une grand influence morale sur lui, ou que cette personne a une tendance à accorder très peu de confiance à son jugement, ou si cette personne veut profondément aller dans mon sens. Mais dans tous les autres cas, une personne dans un état ordinaire de relation critique (non hypnotisée et personnalité mature) ne subira aucune influence.

2. instruction
  • Trouve que l'eau est chaude !
  • Je veux que tu trouves que l'eau est chaude !
  • L'eau te semble chaude !
Ces phrases sont des ordres purs et simples et pas encore des suggestions. Or les ordres portant sur la sensation ne seront presque jamais obéis sincèrement hors d'un état hypnotique. La personne pourra éventuellement mentir si elle ressent une forte pression de l'autorité. Mais le fait de lui ordonner ne lui fera pas pour autant sentir que l'eau est chaude. Au contraire, beaucoup de gens auront une tendance à prendre le contre-pied pour ne pas se soumettre à l'autorité directe. Il faudrait les combiner avec des techniques de soumission (compliance), comme la réciprocité, le fait de se rendre aimable, la concession, etc., mais ça n'est vraiment pas notre propos, d'autant que ça ne semble pas très pertinent lorsqu'il s'agit de représentations et de jugements.

3. suggestion directe
  • Tu as vu comme l'eau est chaude ?
  • Mets ta main dans l'eau si chaude

  • Attention, elle est peut-être chaude. 

  • Tu vas peut-être la trouver chaude. 

Ce sont déjà des suggestions car des tentatives d'influencer le jugement mais dites « directes » parce que le fait que l'eau soit chaude est encore central, et la suggestion est très évidente pour quiconque.

4. suggestion indirecte par présuppositions
  • Si tu veux te réchauffer, mets ta main dans l'eau ;
  • Est-ce que l'eau est plus chaude dés que tu y mets la main ou après quelques secondes ?
  • Est-ce que la chaleur de l'eau est encore supportable ou limite ?

Ici, on fait porter l'attention de la personne sur quelque chose qui présuppose déjà que l'eau est chaude. Dans les présuppositions, il y a plusieurs catégories (double-liens, implications...) que nous ne détaillerons pas ici.

5. suggestion indirecte par évocation
  • Je boue d'impatience de connaître ton avis. Tu sais comment parfois on peut percevoir les choses différemment les uns des autres. Quand on partage son avis sur quelque chose parfois, ça devient chaud, même. Quand il fait 30°c, si tu viens d'Egypte, tu n'auras pas chaud alors qu'un norvégien pourra vraiment trouver qu'il fait trop chaud. Tiens, mets ta main dans l'eau, doucement, fais attention et dis-moi comment tu la trouves ?

Suggestions subliminales. Le choix des mots, les idées mises en avant, les exemples, etc. évoquent tous ce que je veux suggérer : de la chaleur + le fait qu'une sensation est subjective (donc le fait qu'on peut s'illusionner). Cela crée un faisceau convergent d'associations d'idées qui favorisent le fait que la personne trouve l'eau chaude puisque l'idée de chaleur est déjà installée en elle au moment de l'expérience. Si la suggestion est suffisamment subtile (ce qui n'est volontairement pas le cas dans l'exemple ci-dessus), la personne ne s’aperçoit pas du tout que son jugement a été modifié par l'autre et croit que ce qu'elle fait ne vient que d'elle. C'est pourquoi il s'agit du style le plus indirect de suggestions et qui, utilisé très subtilement permet une influence très forte. Evidemment, plus on fera converger d'idées, de mots, d'images, etc... suggérant tous la même représentation et plus on aura de chance que la personne se laisse influencer par tout cela. Egalement, on aura soin de faire toutes ces suggestions dans un climat d’approbation (que la personne ait tendance à nous écouter en opinant positivement du chef).
Là aussi il y a des catégories (saupoudrage, etc...) mais qui ne nous semblent pas toujours pertinentes et pas utiles à détailler ici. 


Les suggestions non verbales : 


La pantomime : c'est un type de suggestions particulièrement efficaces si exécuté subtilement et non sur-joué. Je peux par exemple, mettre la main dans le seau moi-même mais faire mine de me brûler puis souffler sur ma main comme pour la refroidir. Le oui et le non : c'est une forme de suggestion non-verbale combinée à la suggestion verbale. Je peux dire par exemple « l'eau est peut-être froide, ou tiède ou alors l'eau est très chaude ». Et au moment ou je dis les mots « froide » et « tiède », je fais un léger geste « non » de la tête et peut-être une légère moue d'incrédulité. Lorsque je dis « l'eau est chaude » je le dis avec une voix légèrement plus projetée, plus assurée et en faisant un geste « oui » de la tête avec une expression de conviction. Cette suggestion, si elle est répétée et combinée avec d'autres est étonnamment très efficace avant et pendant l'expérience. L'effet de contraste : je peux mettre un seau d'eau glacée et un seau d'eau tiède. Je demande alors à la personne de mettre d'abord la main dans l'eau glacée avant de la mettre dans l'eau tiède qu'elle trouvera chaude.
Ici c'est le contexte qui influence le jugement. Je peux mettre en scène le contexte afin qu'il influence le jugement de la personne.
Le contexte : de la même façon, je peux mettre au mur des photographies et images évoquant la chaleur ou bien tenir la pièce particulièrement froide. Ca ne suffira sûrement pas, mais ça peut contribuer au faisceau convergent. 


Conclusions :

Ce ne sont que quelques exemples de suggestions et bien sûr il en existe beaucoup d'autres formes. Mais ces catégories principales vous permettrons d'y voir un peu plus clair. Retenez une chose : lorsqu'il s'agit des représentations (jugements, appréciations, perceptions, sensations, goûts, etc...) plus une suggestion est subtile, subliminale et imperceptible et plus elle est efficace. 


 Suggestion et hypnotisme :

Dans le champ de la recherche moderne, au XIXe siècle, la suggestion comme puissance d'influence a commencé a être étudiée dans le cadre des recherches sceptiques sur l'hypnotisme. Puis rapidement, à cet époque, les chercheurs ont distingués ces deux phénomènes et étudiés séparément l'hypnotisme et la suggestion.
Dans le cadre de l'hypnotisme, ce qu'on appelle la « suggestion hypnotique » est un phénomène assez distinct de la suggestion en général et qui mérite d'être étudié à part.
Cependant, pour parvenir à plonger une personne dans un état second d'hypnose, on s'est rapidement rendus compte que les suggestions (telles que décrites plus haut) ajoutaient beaucoup d'efficacité aux techniques physiologiques mécaniques et pouvaient même les remplacer. En gros, l'hypnose et la suggestion sont deux choses totalement distinctes, mais on peut obtenir de l'hypnose par la suggestion.
En réalité, la suggestion bien maîtrisée permet de recréer « artificiellement » beaucoup d'états altérés comme l'ivresse, la narcose, le sommeil, la stupeur, l'euphorie, le somnambulisme, l'obnubilation, l'obsession, la colère, etc., sans aucune substance et sans préparation préalable. Pas étonnant alors que la suggestion permette de provoquer des états d'hypnose.

Mais le plus étonnant, c'est qu'elle permet d'obtenir
sans passer par un état altéré la plupart des phénomènes d'illusion, d'hallucination, et de distorsion de la perception, de la mémoire, etc. qu'on obtenait jusque là avec les personnes en somnambulisme hypnotique ou des personnes en crise hystérique.
Les mots peuvent influencer à tel point notre jugement qu'ils changent les règles de notre réalité, sans même avoir à être dans un état second.


lundi 11 juin 2012

Les bons conseils, les mauvaises suggestions, et les dégâts de la pensée positive...


"The secret" : une version laïque contemporaine de l'intentionnalité judéo-chrétienne ?

Précédemment, j'ai présenté à plusieurs reprises ce qu'est une suggestion. En bref, une suggestion est une information (mot, phrase, idée, geste, image, etc...) qui tend à influencer une personne dans son jugement, son interprétation, sa perception. Si un ami m'envoie le sms suivant « est-ce que tu veux aller au cinéma ce soir ? », on ne peut pas dire que cette question soit très suggestive.
Si, par contre, il m'écrit « qu'est-ce que tu dirais de te faire un bon petit film entre pote ? », alors il est évident qu'il pose la question de façon suggestive. Il suggère au passage l'idée que ce sera bien agréable afin d'influencer ma réflexion et d'augmenter les chances que j’accepte.
Si mon ami est devant moi et qu'il me demande « est-ce que tu veux aller au cinéma ce soir ? », en faisant un geste « oui » avec la tête, un grand sourire et des yeux suppliants, c'est son attitude qui rend la demande suggestive : on parle alors de suggestion non-verbale. Sa façon de me demander n'est pas neutre, elle tend à influencer ma réponse.

La suggestion est un phénomène de la communication absolument extraordinaire. Il existe de nombreuses formes de suggestions, de nombreuses façon d'utiliser les mots, les tournures de phrases, la voix, les gestes, les images, etc., qui permettent d'influencer une personne subtilement dans son jugement, son interprétation, sa perception des choses. Et tout le monde utilise quotidiennement la suggestion, même sans le savoir.

Ce qui va nous intéresser particulièrement aujourd'hui, c'est précisément la façon dont on peut parfois dire ou croire quelque chose qu'on pense positif tandis qu'en réalité la façon dont on le formule, ou dont on se le formule contient une suggestion négative et parfois même très dangereuse.

Prenons un exemple simple : on entend parfois dire que « le bon sommeil, c'est le sommeil d'avant minuit ». Et je n'ai pas l'impression qu'il soit mal intentionné mon bon ami qui me dit « si tu veux être en forme, couche-toi avant minuit ». Et pourtant...
Qu'est-ce que cette simple phrase suggère ? Qu'est-ce qu'elle contient comme information tacite ? Tout simplement, que le sommeil d'après minuit est un « mauvais sommeil » et que si je me couche après minuit, je ne serai pas en forme. Et si je prends un peu trop au sérieux son conseil, chaque fois que pour une raison ou pour une autre je ne pourrai pas me coucher avant minuit, je commencerai à penser « Zut, je vais encore mal dormir et être fatigué demain ». Et en me mettant ça dans la tête, je me fais une auto-suggestion bien malheureuse et qui risque de ne pas m'aider à bien me reposer.

Si mon ami m'avait dit simplement « tu sais, le sommeil avant minuit est encore plus réparateur, alors si tu veux être encore plus en forme, je te conseille de te coucher avant minuit ». Comme je le répète souvent, la suggestion réside dans la nuance. En formulant les choses ainsi, il aurait suggéré que le sommeil est de toute façon quelque chose qui « répare », qu'il n'y a pas de mauvais sommeil. Si je me couche après minuit, c'est bien. Si je me couche avant minuit, c'est encore mieux ! Dans tous les cas, je peux être en forme et reposé. Alors, lorsque je n'ai pas l'occasion de me coucher avant minuit, je peux dire « tant pis, c'est pas grave, je vais quand même bien me reposer ». Et cette auto-suggestion a des chances de m'aider à trouver un repos bien plus facile.

Il en va de même pour toutes sortes de bons conseils très ordinaires.

Lorsqu'on tente de dissuader une personne de fumer en lui disant « Tu sais, quand on fume une fois, on est fumeur à vie. C'est irréversible, on ne redevient pas non-fumeur, on devient au mieux un ancien fumeur en sursis. » En disant ça, on prend un risque énorme : si la personne se met malgré tout à fumer, ce conseil qui, au départ, était pour son bien, pour le prévenir, le dissuader, devient pour lui une vraie prison. C'est faux : une personne qui a été fumeur pendant très longtemps peut devenir absolument et définitivement non-fumeur, et on en connaît tous. Mais si on a la croyance que ça n'est possible, cela devient très difficile d'arrêter.

Lorsqu'on dit à une personne : « pour te relaxer, installe-toi dans une salle très silencieuse ». On crée le risque que le moindre bruit la dérange puisqu'il viendra l'empêcher d'être dans une salle silencieuse, donc l'empêcher de se relaxer.
Si on lui dit « tu auras encore plus de facilité à te relaxer dans une salle silencieuse, mais même au milieu d'un concert de marteaux-piqueurs, tu peux changer ta respiration et te détendre », à ce moment là, la personne n'est pas limitée et peut se relaxer dans n'importe quelle circonstance. D'autant que par effet de contraste, les petits bruits inopportuns seront bien peu de chose par rapport à un concert de marteaux-piqueurs.

Tout simplement, le fait de se réjouir du beau temps : le fait même d'être heureux et réjouis, dynamique et optimistes lorsque le soleil brille va souvent de pair dans nos esprits avec le fait d'être déçus et tristes, mous et pessimistes lorsqu'il pleut.


De la même façon, il est bon de manger cinq fruits et légumes par jour, comme dit le slogan. Mais on peut très bien passer une journée merveilleuse en en ayant mangé que trois.

Ce principe, je l'appelle « l'aspirateur sans sac ». En effet, dans les publicités, on vous présente des aspirateurs qui ont l' « avantage de ne même plus avoir besoin de sacs ». En apparence, c'est une bonne chose. Et pourtant, le revers de la médaille, c'est qu'on se retrouve avec un bac à poussière pas toujours facile à vider et à nettoyer surtout en cas d'humidité. Le sac à poussière est facile à changer et assez propre et pas nécessairement une invention devenue ringarde comme le présentent les publicités. De la même façon, ce qui semble positif en apparence peut contenir un revers négatif. Et ce qui semble négatif ne l'est pas toujours autant qu'on le pense.

C'est un dilemme : affirmer un bien, c'est affirmer un mal. Et la solution à ce dilemme se situe dans la suggestion « utilisationniste » : tous les cas de figures amènent à ma conclusion.
Au lieu de dire, « A est positif », ce qui sous-entend que « B est négatif » (B est le contraire de A), je dis « A est encore plus positif que B ». Il s'agit d'une forme de conjonction paradoxale, « double bind » en anglais.

Une illustration édifiante de ce principe est à trouver dans les idéologies de la « pensée créatrice ».
Beaucoup d'idéologues parfois sectaires, parfois moins, assène comme une vérité leur hypothèse que notre pensée, toute seule, peut avoir le pouvoir de créer la réalité, ou tout au moins de l'influencer.
Ainsi, si je pense que je serai en bonne santé toute ma vie, j'augmente mes chances d'être en bonne santé dans l'avenir. Jusque là, rien de bien méchant. Mais qu'est-ce que cela suggère ? Que si je pense à la maladie, j'augmente mes chances de tomber malade. Rien ne prouve rationnellement cela et au contraire des études ont mis en évidence la fonction simulatrice du cerveau qui permet d'imaginer des choses afin de ne pas avoir à les vivre.

Il n’empêche que ce type d'idée fait de grands dégâts. On se met à avoir peur de sa propre pensée : j'ai peur de penser à la maladie parce que j'ai peur que ça me rende malade, j'ai peur de penser à la mort, parce que j'ai peur que ça ne la fasse venir.
C'est l'expression moderne des tabous et superstitions qui existent depuis bien longtemps : dans beaucoup de cultures, il est très mal vu de parler de malheurs, de la mort, ou de la maladie, et il existe souvent des rituels permettant d'enlever le pouvoir de ces mots (comme toucher du bois, etc...)

De façon moins macabre, on conseille de plus en plus souvent de visualiser ses objectifs atteints, comme de visualiser son futur succès, etc... Et on accuse bien souvent le fait d'avoir « pensé son échec » d'être coupable de nous avoir fait échouer. Là encore, on retrouve ces mêmes raccourcis très dangereux. En plus de la peur de l'échec qui empêche beaucoup de personnes d'agir, on ajoute une « peur de penser à l'échec ». Or, le constat est que n'importe quelle personne raisonnable qui fait quelque chose de risqué a tendance à envisager la situation dans laquelle sa tentative ne réussirait pas.

Si donc, on conseille plutôt à une personne de « ne pas avoir peur d'imaginer le pire, puis, également de bien prendre du plaisir à imaginer le meilleur », on se retrouve face à une suggestion bien plus constructive : ça n'est pas ta pensée qui fait tout, mais elle te permet d'étudier toutes les options pour ensuite faire au mieux et avoir le plus de chances de réussir ».

Avoir peur de sa propre pensée est une chose assez dangereuse puisque les idées tendent à surgir à la conscience par associations de façon souvent difficilement contrôlable. De plus, quand on cherche à « ne pas penser à quelque chose », c'est souvent là qu'on le plus de mal à le chasser de notre esprit.
Heureusement, peu de gens en arrivent à avoir peur de leur propre pensée au point d'en développer une vraie phobie de la pensée négative. Et pourtant, on observe ce symptôme de façon croissante notamment chez les personnes ayant adhérées à une idéologie de la pensée positive de façon assidue. 

Et dans certains cas, cette phobie du négatif peut amener à des pathologies psychiatriques lorsqu'elle se combine avec d'autres peurs. En effet, la peur d'avoir des hallucinations, comme il s'agit d'une pensée, amène une peur de la peur d'avoir des hallucinations, qui se traduit parfois par le développement d'hallucinations hystériques comme on aurait dit à une autre époque, c'est-à-dire d'origine psychique. Ou encore, la peur de la perte de contrôle, comme elle est une pensée, amène à une peur de la peur de la perte de contrôle (si je pense à la « perte de contrôle », je vais commencer à ne plus me contrôler) qui parfois justifie des symptômes de comportements incontrôlés.
 
 Or notre cerveau est fait pour nous autoriser à imaginer ce qui nous fait le plus peur sans pour autant craindre que cela ne le provoque. Si j'ai peur de perdre le contrôle de moi, c'est justement en imagination que je peux franchement affronter cette peur : je m'imagine la pire des situations dans laquelle je pourrais perdre le contrôle de moi. Je ne dis pas que cette pensée soit très agréable, mais je peux y penser, sans pour autant que ça ne le « programme » dans mon cerveau. Bien au contraire, ça tendrait à le « décharger ».

On rencontre une forme de cette phobie du négatif chez certains thérapeutes formés à la « formulation positive ». Dans certains courants de la communication thérapeutique, on enseigne (à tort) que la compréhension inconsciente des mots chez une personne ne prend pas en compte les négations et ainsi qu'il faut veiller, pour avoir un impact positif à ce que chaque mot soit positif. Ainsi, ces thérapeutes ne diront pas « vous avez un problème », mais « vous n'avez pas encore la solution ». Jusque là, cette formulation semble en effet suggestivement plus intéressante.
Le problème arrive quand cette idée est prise tellement au sérieux que certains thérapeutes pensent par exemple que le mot « peur » ne doit pas être prononcé si on ne veut pas « créer » de la peur.
N'importe qui peut faire l'expérience chez lui : répétez 300 fois le mot « peur ». Avez-vous peur ? Non ? En effet, le mot « peur » ne fait pas peur. Comme le mot « mort » ne tue pas. Le mot « maladie » n'est pas une maladie. Le mot « manger » ne fait pas grossir. Etc... Bien au contraire, il existe un phénomène appelé la saturation mentale : si on répète beaucoup un même mot, il sonne « étrangement » et semble perdre son sens. Plus un mot est répété et plus il devient anodin.
De la même façon, ces mêmes thérapeutes sont formés à reformuler votre propre façon de dire les choses pour lui donner une tournure positive. Si vous dites « j'aimerai me débarrasser de ma phobie des souris », ils vous répondront de telle sorte que le mot « phobie » n'apparaisse pas. « Vous aimeriez pouvoir vous sentir à l'aise devant une souris ». Le problème, c'est que ça n'est pas ce que vous avez dit, et que parfois ça tourne à l'acrobatie linguistique.
 
« J'aimerai arrêter de fumer.
  • Vous aimeriez pouvoir vous sentir libre de vos comportements?
  • Euh... en fait, j'aimerai arrêter de fumer dans un premier temps. »

    Le thérapeute qui se comporte excessivement en évitant le négatif communique à son patient très fortement l'information que les mots négatifs sont à éviter et à fuir. Ce qui revient à dire que les mots négatifs sont déjà des choses négatives. Ce qui revient à dire qu'il faut se méfier des mots. En bref, le patient se retrouve en face d'une personne incapable d'appeler un chat un chat parce qu'il a peur des mots. Et la dernière chose que le patient veut, c'est de se retrouver en fasse d'une personne qui a peur de parler de son problème.

    C'est l'effet Aspirateur sans sac : les mots positifs créent un monde positif. Oh, quelle belle pensée ! Et bien non, car cela signifie que les mots négatifs ne sont pas « que des mots », mais qu'ils créent déjà un monde négatif. Ce qui est faux.

    Certes le mot « bonheur » incite plus au bonheur que le mot malheur. Il est plus agréable à prononcer ou à penser. Et pourtant, cela ne signifie pas qu'on puisse devenir malheureux juste parce qu'on dit ou pense le mot « malheur ». Sauf à avoir une telle croyance.

    Voilà comment on utilise quotidiennement, sur soi comme sur les autres, des formes de suggestions que l'ont pense parfois gentilles et innocentes et qui peuvent entraîner des croyances très enfermantes, voire délétères.

    On a tendance à penser que les personnes qui prônent l'optimismes, la gentillesse, la santé, le succès, etc. font du bien au monde. Parfois, ils amènent avec eux bien plus de malheur que ceux qui s'autorisent et nous autorise à ne pas être toujours parfaits, impeccables, souriants et perpétuellement positifs.




jeudi 5 avril 2012

La voiture, le conducteur, le passager : une métaphore de la relation hypnotiseur / hypnotisé


Je poste ici le contenu d'une nouvelle page de mon site web pro. Vous pouvez la retrouver ainsi que le reste à cet adresse www.hypno-paris.fr et qui complète le texte :  Suis-je hypnotisable ?
Votre inconscient est comme une voiture : vous le conduisez du lever au coucher, même si vous ne savez pas toujours comment ça fonctionne vraiment sous le capot. Vous lui donnez la direction et la vitesse. Vous faites régulièrement le plein d'essence (repas, lumière...). Et vous tâchez de l'entretenir (sommeil, exercice physique, loisirs, soins...)
Seulement, si vous allez consulter une personne, c'est que vous ne connaissez pas forcément le meilleur chemin vers votre changement.
Vous savez vaguement où vous voulez aller, mais vous ne savez pas par où passer pour y aller rapidement et de façon sécure.
L'hypnose consiste, d'une certaine façon, à vous assoir sur le siège  passager. Vous confiez temporairement le volant à votre hypnothérapeute pour qu'il vous mette sur la bonne voie.
D'une certaine façon, votre hypnotiseur connaît un bon chemin pour y aller, et plutôt qu'il vous l'explique au risque que vous vous y perdiez, le plus simple reste qu'il vous y conduise. Il ne vous conduira pas forcément à votre destination (ça c'est votre chemin de vie personnel), mais vous conduira jusqu'à une jolie route goudronnée plus facile et plus agréable à suivre.

Comment faire ? Se laisser guider par ses suggestions, et laisser les choses se faire naturellement, à leur rythme.
Depuis la place du passager, vous pouvez encore voir et surveiller ce qui se passe, et reprendre le volant si bon vous semble. Vous pouvez observer la façon de conduire de votre chauffeur si ça vous  rassure. Et pourtant, vous vous laissez bien guider dans la bonne direction.
En effet, un certain nombres de personnes, lors de leur première hypnose, entrent parfaitement dans l'état d'hypnose et pourtant maintiennent une vigilance de chaque instant, décortiquant chaque mot qu'ils entendent et chaque réaction qu'ils observent en eux. Cela ne dérange en rien l'hypnose, bien que ça ne soit pas toujours la façon la plus agréable de la vivre. C'est parfois le cas, surtout la première fois, et c'est une réaction très naturelle et normale.
Ou si vous êtes assez en confiance, bien installé dans le fauteuil du passager, vous pouvez en profitez pour vous reposer ou regarder le paysage. Regarder le paysage revient à laisser vos pensées vagabonder, à rêver, à "décrocher". Certaines personnes, après l'hypnose, s'excusent de ne pas avoir été toujours concentrées et attentives. C'est tout-à-faire normal : ce relâchement de la vigilance est un effet naturel de la confiance. Vous voyez que tout se passe parfaitement, alors inutile de perdre votre énergie à tout surveiller : vous en profitez pour passer un bon moment de détente sans prise de tête. C'est le conducteur lui, l'hypnotiseur, qui fait tout le travail. Tant mieux pour vous. Profitez-en !

Sur votre siège passager, vous pouvez aussi vous sentir tellement en confiance que vous vous assoupissez un moment. C'est l'impression qu'on a parfois dans l'hypnose de s'être endormi, ou d'avoir "décroché". Et puis, parfois, à la faveur d'un mot, ou d'une réaction, on se réveille un peu, mais sans pour autant sortir de l'hypnose. D'où l'impression que l'attention fluctue, qu'on entre et qu'on sort dans des états plus ou moins profonds.

Puis, une fois sur la bonne route, votre hypnotiseur vous rend le volant. C'est ce qu'on appelle le réveil. Vous redevenez pleinement actif (pas seulement inconsciemment). Vous n'avez plus qu'à continuer dans la même direction. Si vous décidez d'en changer, c'est votre choix. Mais si vous continuez, vous mettez à profit tout le travail fait en hypnothérapie. C'est facile, mais ça demande quand même que vous regardiez la route et continuiez d'avancer par vous-mêmes : vous êtes seul responsable de votre chemin de vie. Personne n'ira à votre place où vous voulez aller. Et même si des professionnels compétents peuvent vous apprendre à conduire ou vous montrer le chemin, personne ne peut vous conduire jusque au bout sans que vous n'ayez rien à faire. C'est ça le réveil de l'hypnose : après un petit coup de pouce, à vous de jouer maintenant.
Et c'est l'aboutissement de toute thérapie : une route nouvelle s'ouvre devant vous vers un horizon que vous pouvez enfin voir à nouveau. Et c'est avec un enthousiasme redécouvert et une certaine légèreté que vous pouvez vous conduire vous-même toujours plus loin dans cette direction.

La résistance inconsciente à l'hypnose

Certaines personnes ont les mains crispées sur le volant et beaucoup de mal à le laisser à quelqu'un d'autre. Pourtant elles aimeraient bien elles aussi se laisser conduire un peu vers la bonne direction. Mais être passager et spectateur de ce qui se passe leur est difficile. Pas toujours facile de se laisser guider en toute confiance, surtout quand l'enjeu personnel derrière est important.
C'est tout-à-fait normal. C'est un réflexe naturel qui nous évite de nous laisser manipuler par n'importe qui n'importe quand. Seulement, dans la relation hypnotique, on aura besoin de dépasser cette méfiance naturelle pour faire un vrai travail d'équipe. On doit apprendre à se faire confiance sans prendre le temps de se connaître comme des amis proches le font.
L'induction hypnotique, ce sont des méthodes qui vous apprennent à détacher les mains du volant et à vous installer de plus en plus à la place du passager. Certains y arrivent après quelques secondes. Pour d'autres, l'enjeu est tel que cela prend plus de temps. En effet, en thérapie, la route sur laquelle on s'aventure fait parfois un peu peur, et on redoute de s'y diriger. En réalité, votre hypnotiseur vous accompagnera d'une façon parfaitement rassurante et agréable. 

L'auto-hypnose guidée
 
Si vraiment vous ne parvenez pas à vous laisser guider, ça n'est pas grave. Que l'hypnotiseur prenne le volant est la solution la plus simple et la plus rapide, mais ça n'est pas la seule, heureusement. 
Nous pouvons aussi passer par une auto-hypnose guidée : vous gardez le volant, c'est vous qui continuez de conduire votre propre inconscient, et l'hypnotiseur, lui, se contente d'être le co-pilote (ou le GPS). Il vous donne les directions, il vous dit quoi faire et où aller.
Vous entrez en hypnose et faites les changements vous-même grâce aux instructions données.
La seule différence avec une hypnose basée sur une confiance totale, c'est que vous n'aurez peut-être pas la possibilité d'expérimenter la perte partiel de contrôle et les distorsions de perception que beaucoup attendent de l'hypnose. Mais ce ne sont que des gadgets de l'hypnose qui sont sans importance pour l'hypnothérapie. L'état d'hypnose, vous le vivrez tout aussi pleinement et les petites "preuves extérieures", il y a fort à parier qu'elles vous paraitront dérisoires. Toutefois, l'auto-hypnose guidée permet, dans la plupart des cas, d'obtenir une confiance nécessaire pour que vous finissiez par vous laisser pleinement guider. Alors vous pourrez obtenir les mêmes effets que n'importe qui et vous aurez appris quelque chose qui constituera 80% de votre thérapie : le lacher-prise.
Une fois que vous avez vu qu'on ne vous emmène pas n'importe où et que vous êtes rassuré, vous vous dites : après tout, autant se détendre et en profiter au maximum... Et vous pouvez redonner le volant au co-pilote et jouir du paysage sur la route du changement.

Certains hypnotiseurs utilisent même exclusivement cette méthode pour accompagner les personnes, et ne prennent jamais le volant : ils disent aux personnes quoi imaginer, quoi faire, et quoi se suggérer. C'est une méthode issue des élèves d'Erickson qui est parfois confondue à tort avec l'hypnose ericksonienne. Cette méthode très efficace et qui ne nécessite pas d'établir un grand rapport de confiance est souvent généralisée par les hypnotiseurs qui veulent accompagner très rapidement et de façon très directe (puisqu'il y a entière participation et collaboration du sujet) des personnes dans un contexte qui offre peu de temps (street hypnosis...). En hypnothérapie, elle sera surtout adressée aux personnes qui résistent à se laisser guider.


Dans certains cas très rares, ni l'entraînement progressif, ni l'auto-hypnose guidée ne suffisent à obtenir une confiance suffisante au travail même après la deuxième séance. Certaines personnes, non seulement ont les mains tellement crispées au volant qu'elles ne se laissent pas conduire, mais en plus ne vont pas à droite quand on leur dit d'aller à droite, ni à gauche quand on leur dit d'aller à gauche. Ces personnes aimeraient bien même qu'on les "force" à se mettre en passager et qu'on les guide comme les autres. Mais une certaine peur, ou parfois une habitude de sur-contrôler,et un défaut de confiance les en empêche fortement. Là encore, rien d'anormal. Un entraînement progressif, prendre le temps d'établir une vraie confiance, certaines méthodes adaptées, etc. permettent de se détendre progressivement et de réunir les conditions propices à l'hypnose.


Mais dans le cadre de l'hypnothérapie, qui est une démarche tarifée et limitée dans le temps des séances, il est possible que les personnes se découragent avant d'avoir atteint le véritable bénéfice des séances. Dans ces cas, pourtant rares, il est raisonnable de la part de l'hypnothérapeute d'indiquer à la personne qu'une autre forme de thérapie, moins basées sur le lacher-prise et une relation de confiance à autrui, sera plus adaptée. 

 
***
J'espère que cette métaphore offrira un éclairage qui vous permettra de comprendre dans quelle attitude vous pouvez vous préparer à vos séance d'hypnose. 

Gardez une chose à l'esprit  : presque toutes les personnes qui se pensent difficilement hypnotisables s'avèrent en réalité très aptes à entrer dans des états d'hypnose profonds très rapidement. Les autres prendront juste un peu plus de temps.
Demandez conseil à votre hypnotiseur.

Suis-je hypnotisable ?


 
Body snatchers

Je poste ici le contenu d'une nouvelle page de mon site web pro. Vous pouvez la retrouver ainsi que le reste à cet adresse www.hypno-paris.fr
 
Suis-je hypnotisable ?
Tout le monde peut développer un état intérieur d'hypnose. Lorsque vous vous endormez le soir, ou lorsque vous vous réveillez le matin, vous passez d'un état de conscience à une configuration totalement différente de votre conscience. Vous le faites quotidiennement et très naturellement.
L'hypnose est un changement d'état de la conscience beaucoup moins radical que le sommeil et tout aussi naturel. Il est donc à la portée de chacun.
Mais contrairement au sommeil, on ne s'est pas exercé quotidiennement à faire ce glissement de la veille à l'hypnose et de l'hypnose à la veille de façon volontaire. C'est pourquoi votre hypnotiseur vous guide dans les premiers pas, il vous apprend à effectuer ce glissement en cherchant avec vous la façon la plus adaptée.
Certains y parviendront naturellement en quelques secondes à peine. D'autres auront besoin d'un peu plus d'entraînement. C'est cet entraînement qu'on appelle "induction hypnotique". Il existe beaucoup de méthodes d'inductions. Certaines auront plus d'effet que d'autres sur vous.
Soyez patients : tout comme le sommeil, moins on est pressé de s'endormir, et plus on s'endort facilement et rapidement.

Est-ce que je dois y croire pour que ça marche ?
Non, ça n'est pas nécessaire. Vous n'avez pas besoin de croire au sommeil pour vous endormir, n'est-ce pas ? Si vous êtes fatigué, ou dans de bonnes conditions, ça se fait naturellement. Idem pour l'hypnose : votre hypnotiseur vous mettra dans les meilleures conditions pour vous faire découvrir cet état de la façon la plus agréable.
Avant d'avoir vécu cet état, il est tout-à-fait normal et sain de ne pas être à 100% convaincu de sa réalité. L'hypnose n'est pas une illusion, c'est un mécanisme réel du cerveau qui n'est pas basé sur une croyance, même si une croyance a priori plutôt favorable peut accélérer le processus.
Venez comme vous êtes : avec vos doutes, vos apréhensions, vos attentes, votre motivation. Et votre envie de découvrir ce dont vous êtes vraiment capable.

Suis-je réceptif à l'hypnothérapie ?
L'accompagnement dans un état d'hypnose ne nécessite pas de s'abandonner totalement au contrôle de l'hypnotiseur, en particuler pour un usage thérapeutique où il s'agit plus d'un travail commun à un niveau intermédiaire. Pourtant, le glissement dans un état d'hypnose repose sur une relation de confiance entre l'hypnotiseur et l'hypnotisé qui permet un certain degré de lacher-prise.
La différence principale entre l'hypnose et un endormissement naturel, c'est que dans le contexte d'une séance d'hypnose, il y a une personne que vous connaissez à pein, près de vous et qui vous parle. L'état est naturel, mais la situation l'est forcément un peu moins. La vigilance ne se relâche pas autant que dans un contexte ordinaire et familier, et c'est parfaitement normal. C'est aussi la raison pour laquelle vous n'allez pas vous endormir comme on dort la nuit dans son lit, mais entrer dans un état d'hypnose, un mélange d'assoupissement de certaines fonctions avec le maintien d'une certiane vigilance et d'une capacité de contrôle. C'est ce qui crée le côté intérieurement très vivant de l'hypnose.
Si votre attitude envers l'hypnotiseur est fondamentalement hostile, vous perdrez votre temps. Accueillez joyeusement et paisiblement ses suggestions car ce sont elles qui feront de cet état une expérience bien plus vivante et ciblée qu'un simple sommeil et permettront des changements en profondeur. Votre hypnotiseur connaît bien son métier et maîtrise l'accompagnement qu'il vous propose. Il ne vous reste qu'à vous laisser guider.
La plupart d'entre nous sommes largement capables d'atteindre rapidement un lacher-prise bien suffisant pour permettre l'hypnose et les changements qui sont rendus possibles à travers cet état. Votre hypnotiseur est là pour vous expliquer ce qu'il y a à savoir, et vous accompagner d'une façon adaptée.
La grande majorité des personnes qui pensent ne pas être hypnotisables sont en réalité très aptes à l'hypnose et peuvent en tirer des bénéfices très rapidement.

Dans quels cas l'hypnose n'est pas adaptée ?
Quelques rares personnes ont un mode de fonctionnement qui leur rend l'hypnose moins facilement accessible qu'à d'autres. Ces personnes auront besoin d'un long apprentissage afin de se laisser suffisamment aller et faire assez confiance à l'hypnotiseur pour atteindre l'état qui leur permettra de tirer les véritables bénéfices de cette méthode et pas seulement un effet placébo.
Il est vrai que les très rares personnes pour qui l'induction hypnotique nécessiterait plusieurs heures d'entraînement peuvent ressentir une frustration et une impatience qui permet légitimement de dire que cette méthode n'est peut-être pas des plus indiquée dans leur cas. 


Contre-indication psychiatrique et médicale
En outre, l'hypnothérapie est une démarche d'accompagnement brève qui vise des changements assez rapides. Pour se faire dans les meilleures conditions, l'hypnothérapie ne doit pas s'appliquer à des personnes trop fragiles ou ayant une personnalité trop instable. Si vous pensez être dans ce cas, nous vous conseillons de vous adresser à un psychiatre et d'envisager une thérapie sur le long terme. Les personnes émotionnellement très fragiles, les personnes très instables ou souffrant d'une grande immaturité peuvent être très réceptives à l'hypnose, mais la pratique de l'hypnose leur est déconseillé.
Si vous avez déjà consulté un psychiatre, même longtemps auparavant, ou si vous en consultez un, si vous vous demandez si vous ne devriez pas consulter un psychiatre, vous devez dans tous ces cas impérativement en parler avec votre hypnothérapeute. Le cas échéant, vous devez prévenir votre psychiatre ou votre psychologue de votre volonté d'entreprendre une démarche d'hypnothérapie en complément.
Si vous êtes sous traitement médicamenteux à long terme ou ponctuel, prescrit pasun médecin ou non, il est également impératif d'en avertir votre hypnotiseur.
L'hypnose est un état de conscience modifié qui se construit sur la base d'un état normal. Si vous êtes dans un état déjà modifié par desmédicaments, de l'alcool ou des stupéfiants, l'hypnose sera inopérante et contre-indiquée. Vous devez en avertir votre hypnotiseur.
Votre hypnothérapeute se réserve le droit d'interrompre votre suivi à tout moment s'il juge nécessaire que vous consultiez un médecin pour définir votre état. Cette démarche d'accompagnement peut être un complément à un suivi médical sur recommandation d'un psychiatre mais ne se substitue en aucun cas à un acte médical.
L'hypnose n'est pas une réponse à une demande de soin ou de traitement médical. L'hypnose n'est pas une médecine alternative. L'hypnose ne remplace pas les médicaments. L'hypnose ne prévient ni ne guérit les pathologies mentales ou physiques.

 ***

Dans le respect des limites de ce cadre, vous pouvez bénéficier pleinement des bienfaits de l'hypnose. Cette véritable pédagogie de la confiance et du lacher-prise vous ouvrira les portes d'expériences hors du communs et de changements et développements personnels extraordinaires.

lundi 19 mars 2012


Ateliers de perfectionnement aux techniques de l'induction hypnotique et de la suggestion

Entraîner un sujet réfléchi ou résistant au lâcher-prise et à la dissociation hypnotiques



Atelier sur le thème : 
 
la saturation par tâches multiples

Dimanche 6 mai
de 8h30 à 18h30
70 rue des maraîchers, Paris 20ème
Métro Maraîchers







Animé par Antoine Garnier, hypnothérapeute et formateur en hypnose appliquée


Présentation


Les méthodes d'inductions hypnotiques par saturation de l'attention sont une base essentielle de l'hypnotisme, notamment pour l'augmentation de la réceptivité, l’approfondissement de l'hypnose et l'entraînement des sujets résistants. Cette saturation peut s'obtenir par diverses méthodes dont une, bien souvent abordée dans les formations à l'hypnose, qui consiste à demander de la part de la personne l'exécution simultanée de plusieurs petites tâches mentales ou motrices très simples. Cette saturation, si elle est menée de façon adaptée, peut aboutir à une hypnose spontanée dans le meilleur des cas, et dans les autres cas à une disposition mentale propice à l'hypnose et à la suggestion. Reste que cette méthode souvent ludique et dynamique n'est pas toujours facile à intégrer dans une séance d'hypnothérapie. Il n'est non plus toujours évident de décider judicieusement des tâches à exécuter en fonction du cas, ni de les présenter de façon claire et construite. Et reste ensuite à savoir utiliser l'état de saturation qui en découle soit pour en faire un entraînement à l'hypnose, soit pour l'orienter vers un état propice à la thérapie ou à une autre démarche d'utilisation.
Dans ma pratique professionnelle de l'hypnose, j'ai souvent recours à des inductions par saturation, et en particulier par tâches multiples. L'expérience m'a notamment appris que cette induction en apparence très simple peut se décliner sous de nombreuses formes et être utile dans de très nombreux cas. C'est pourquoi je propose cette journée de travail autour de cet outil à tous ceux qui, parce qu'ils débutent dans leur usage de l'hypnose, ou parce qu'ils n'ont jamais accordé beaucoup d'intérêt à ce type d'inductions, ne se sentent pas encore à l'aise avec cette technique et désirent approfondir leur connaissance et leur maîtrise de la saturation par tâches multiples.


Cette journée d'exercice permettra notamment de s'entraîner à :

  • vaincre les résistances et approfondir la transe hypnotique
  • accélérer et utiliser la fatigue mentale
  • utiliser la concentration et la déconcentration
  • augmenter la spontanéité
  • comprendre les réactions d’inertie mentale, d'automatisme, et de catalepsie
  • provoquer des patterns et les interrompre
  • concevoir un entraînement à l'hypnose sur-mesure
  • concevoir des exercices d'auto-hypnose pour les personnes peu réceptives

Public concerné
  • professionnels de l'hypnose (débutants ou non)
  • personnes en cours de formation
  • non professionnels utilisant l'hypnose (en fonction du cas)
    Cet atelier porte sur un outil très simple et ludique qui ne demande aucune base pour être appris et utilisé. Il peut être suivi par n'importe quelle personne non formée à l'hypnose. Cependant, le but en est la création d'états hypnotiques ; cela engage donc une grande responsabilité quant à l'usage fait de cet outil. C'est pourquoi cet atelier se destine aux personnes pouvant justifier d'une utilisation sérieuse de l'hypnose dans leur activité.

Pré-requis 

Aucun.
Avant le jour de l'atelier, vous recevrez une brochure expliquant les techniques abordées et proposant des exercices préparatoires afin de pouvoir utiliser le maximum de temps en commun pour l'entraînement pratique.

Tarif

100 € TTC par participant pour la journée entière d'atelier.

Ce prix comprend également les supports écrits envoyés avant et remis pendant l'atelier.


Pourquoi un atelier ? 


Une formation a la prétention d'enseigner des techniques nouvelles en mêlant présentations historique et théorique à des exercices pratiques. A travers ces ateliers de perfectionnement, mon désir est plutôt de répondre à une demande de la part de mes collègues en début d'activité ou en cours de formation qui souhaitent approfondir certains points et certaines techniques déjà abordées lors de leurs formations générales. Des collègues plus expérimentés m'ont également fait part de leur intérêt pour des sessions d'entraînements à des outils qu'ils n'ont pas toujours intégrés pleinement à leur pratique ou avec lesquels ils ne sentent pas toujours à l'aise. L'atelier n'a pas pour ambition d'enseigner quelque chose de « vrai » ou de théorique, mais de partager mon expérience et mon approche des techniques de l'hypnose et de la suggestion, façonnées par des années de pratique en cabinet et en tant que formateur au sein d'écoles d'hypnose et de psychothérapie.
Bien que je me positionne comme animateur de ces ateliers, j'ai le désir qu'ils soient la rencontre d'égal à égal de professionnels curieux d'échanger et de progresser ensemble. Certains thèmes peuvent s'ouvrir à des personnes n'exerçant pas l'hypnose, mais pouvant bénéficier de l'outil dans leur activité. En outre, certains thèmes requièrent des connaissances de bases, et d'autres peuvent être abordés sans aucun pré-requis.


Atelier suivant



Dimanche 17 Juin sur le thème : « Les suggestions-ratifications en trois temps » (thème susceptible d'évoluer)



Pour plus d'informations :

Antoine Garnier
06 62 18 90 94




Formulaire d'inscription

Demandez-le par courrier électronique à contact@hypno-paris.fr

lundi 13 février 2012

De la distraction à l'hypnose... et vice versa...

 Un drôle de pickpocket dans les règles de l'art.

Index des parties :
Qu'est-ce que la distraction ?
L'art de faire diversion et l'art de la suggestion.
De la distraction à l'hypnose...
Hypnotiser.
La qualité de l'hypnose.
Hypnotiser rapidement.
L'hypnose est un phénomène naturel mais PAS quotidien.
L'hypnose sans transe. La confusion entre distraction, suggestion et hypnose.
Obtenir les mêmes phénomènes par la distraction et par l'hypnose.
L'anesthésie par distraction et l'anesthésie hypnotique dans l'exercice médical.
Pour conclure...

Qu'est-ce que la distraction ?

Il est un phénomène très banal et pourtant extraordinaire quasiment indissociable du thème de l'inconscient, et c'est... la distraction. Elle est un thème plus que classique de la psychologie expérimentale. Mais qu'est-ce vraiment que la distraction ? En quelque sorte, le pendant de la concentration.
Lorsqu'on est concentré sur quelque chose, on est distrait de toutes les autres. Et inversement. Le cancre qui rêvasse à ses dernières vacances au fond de la classe : pour le professeur, il est un élève distrait, car il n'est pas concentré sur la leçon. Mais de son point de vue, le cancre a sûrement l'impression d'être parfaitement capable de se concentrer... sur ses souvenirs de vacances. Tellement concentré qu'il n'entend même plus son professeur. A peine un flot inintelligible de mots, un bourdonnement de fond. Et seulement quand le maître répète son prénom, le cancre est tiré de ses souvenirs, et son attention est violemment forcée à revenir dans la triste réalité de sa salle de classe.

La plupart des techniques de prestidigitation sont de pures techniques de distraction. Tandis que le magicien attire d'une façon ou d'une autre votre regard (et votre attention) vers sa main gauche, vous êtes trop distrait pour voir qu'il intervertit des cartes de sa main droite.

La conscience ne peut pas tout-à-fait se porter sur plusieurs choses à la fois, sauf à passer très rapidement de l'une à l'autre. Mais lorsqu'une une tâche nous demande beaucoup d'attention, il est très difficile de surveiller autre chose en même temps. Est-ce que, pour autant, on arrête de faire les choses, de les percevoir ? La plupart du temps, non. Quand nous n'y faisons plus attention, tout ce qui peut se faire automatiquement (parce que c'est très facile, ou parce qu'on a l'habitude de le faire) se fait automatiquement. Comme notre conscience se porte alors sur autre chose, on oublie qu'on le fait, et pourtant on continue de le faire, c'est pourquoi on dit qu'on le fait « inconsciemment ».
Par exemple, vous conduisez. Et votre passager entame une conversation passionnante qui vous captive totalement. Si vous êtes un conducteur expérimenté, vous allez continuer de conduire normalement, de vous adapter aux situations, de doubler des voitures, de surveiller vos rétro-viseurs, de façon parfaitement automatique, sans y prêter attention. Parfois, une petite attention pour être vraiment sûr, mais guère plus. Une petite vérification en passant. Si on vous demande combien de véhicules vous avez dépassé, et de quelles couleurs, vous serez incapable de le dire. Tout ce dont vous vous souvenez, c'est de cette conversation passionnante. Votre cerveau et votre corps n'ont alors plus besoin depuis longtemps que vous soyez concentrés sur votre conduite pour conduire parfaitement.
Qu'est-ce à dire ? La concentration, c'est le domaine de la conscience. La distraction, c'est l'immense champ de l'inconscient. Ce que je n'écoute pas, je l'entends quand même. Et je perçois énormément plus d'informations que je ne le sais. C'est tout le champ du subliminal.
Et c'est comme cela qu'on a décrit les phénomènes naturels de la distraction dont voici quelques exemples :
  • la catalepsie : rigidité naturelle du corps qui permet de maintenir longtemps une position inconfortable sans se fatiguer. Imaginez que vous êtes à la terrasse d'un café. Vous amenez votre tasse à la bouche pour boire lorsque...Paf ! Une voiture en percute une autre un peu plus loin dans la rue. Les gens s'agitent et vous observez la scène, médusé, surpris. Votre bras reste suspendu en l'air aussi longtemps que cet accident accapare toute votre attention, et vous distrait de tout le reste. Puis lorsque vous reprenez des mouvements et des pensées plus libres, vous continuez de boire comme si de rien n'était. Pendant que vous étiez parfaitement captivé par la scène, tout votre corps était dans une catalepsie temporaire et naturelle.
  • L'hallucination négative : ne pas voir, entendre, sentir, ou percevoir quelque chose qui est pourtant présent. On pourrait citer à nouveau l'exemple du cancre qui pense à ses dernières vacances avec une telle intensité qu'il n'entend plus la voix de son professeur. Ou bien au contraire, un professeur passionnant vous captive pas son cours magistral dans tous les sens du terme. Et vous oubliez littéralement que votre siège est très inconfortable, qu'il fait un froid sibérien dans la salle, et vous n'entendez même plus les deux pipelettes papoter derrière vous.
  • L'anesthésie : c'est l'hallucination négative des sensations. Lorsque vous enfilez vos vêtements le matin, à moins que ceux-ci vous grattent, vous en faites instantanément une hallucination négative, vous les oubliez, pour toute la journée, car tout vous distrait de cette information si peu importante.
  • L'analgésie : c'est le fait de percevoir moins fortement ou plus du tout une douleur. A moins qu'elle soit très vive, la plupart des douleurs ne sont pas perçues en continu mais juste quand on y fait attention. Bout-à-bout, les moments où on a prêté attention à la douleur ne constitueraient souvent qu'une petite partie de la journée. Et pourtant, on a parfois l'impression après coup d' « avoir eu mal toute la journée », une illusion de continuité. De la même façon, la meilleure façon d'aider un ami qui a une douleur, ça n'est pas de lui en parler pour lui dire que « ça n'est pas grave », mais de l'en divertir, de lui faire penser à autre chose, et à des choses qui captivent tellement bien son attention qu'il en oublie, l'espace d'un long instant, cette satanée douleur.
  • L'attention sélective : certaines informations peuvent venir rompre même temporairement la distraction. Le cancre, malgré la profondeur de sa rêverie, sera ramené à la réalité s'il entend son prénom, ou un mot qui n'est pas cohérent avec le langage de son professeur (les professeurs savent qu'employer un terme grossier ou ayant un double sens impudique permet de récupérer l'attention des élèves), ou bien s'il entend un silence trop long dans la classe (il se demandera si on ne vient pas de l'interroger lui). De la même façon, vous êtes en conversation avec un ami dans un café. Et la conversation du couple derrière ne vous intéresse pas plus que cela. Et pourtant certains mots « ressortent », attirent votre attention régulièrement. Et tout se passe comme si il prononçaient une bouillie de mots incompréhensibles avec, de temps en temps, un mot clair et frappant. Il y a fort à parier que vous perdiez temporairement le fil de la conversation avec votre ami. Et pourtant, tout comme le conducteur continue de conduire, vous continuerez sûrement de montrer touts les signes d'une écoute active et d'approuver ce qu'il dit, même si votre allure sera assez mécanique et pas très vive. Espérons juste qu'il ne vous sorte pas un « Qu'est-ce que tu en penses ? » à ce moment précis.
  • L'amnésie : il est déjà difficile de se souvenir dans le détail des choses auxquelles ont prête attention, alors les choses dont on n'a pas conscience sont d'autant plus difficiles à retrouver dans notre mémoire. Et pourtant, le cancre à qui le professeur demandera « Répétez ce que je viens de dire » pourra sûrement « rembobiner » les dernières phrases, stockées dans une mémoire à très court terme, et les répéter comme s'il avait été attentif.
  • Le souvenir caché : une information qui n'était pas accessible lorsque vous essayiez de vous en souvenir volontairement, avec concentration, vous revient en mémoire au moment où vous vous y attendez le moins, où vous êtes le plus distrait par rapport à cela. Vous avez le nom de cet acteur sur le bout de la langue, celui qui joue le méchant dans le dernier James Bond, mais impossible de vous en souvenir, plus vous essayez et plus il vous échappe, il glisse, insaisissable, comme la savonnette dans la baignoire. Et puis vous passez à autre chose, et au bout d'un certain temps... hop, le nom vous revient.
  • Les réponses automatiques : ce sont des réactions réflexes à des situations. Vous avez une conversation passionnante avec un ami. Sans s'interrompre, il vous propose un verre. Vous lui répondez spontanément « non, merci », entre deux phrases. Et puis vous vous reprenez en disant « mais en fait, si avec plaisir, je ne sais pas pourquoi j'ai dit ça ». Vous étiez si distrait par la conversation que vous avez géré la situation par un réflexe social qui est de refuser poliment cette offre (ou l'inverse). De la même façon, si quelqu'un vous parle mais que vous avez un peu « décroché » de la conversation, et qu'il vous jette un « n'est-ce pas ? » à la figure, vous aurez très certainement le réflexe de répondre « oui », du moins avec la tête, avant de réfléchir pour vous reprendre si nécessaire.
  • La suggestion subliminale : c'est une information qui est perçue par les sens, et traitée par le cerveau mais sans qu'on s'en rende compte, si bien qu'on peut y répondre sans savoir pourquoi on le fait. Reprenons la conversation avec un ami dans le café et le couple qui discute derrière. Certains mots de ce couple vous « parlent » et pourtant vous n'y faites pas attention. Mais vos oreilles les entendent, et... hop, alors que vous parlez à votre ami, vous utilisez sans le savoir un mot de leur conversation. Vous bifurquez sur un thème dont ils sont en train de parler. Et vous êtes sûr que c'est juste parce que vous y pensez. De même, vous faites vos courses dans un magasin, et vous vous demandez quelle lessive vous allez acheter. Vous ne prêtez aucune attention à la publicité dans le fond sonore pour une barre chocolatée. Mais après un moment, vous avez bien envie de vous faire plaisir en achetant une barre chocolatée de cette marque, sans savoir vraiment d'où vous vient cette envie. Lorsqu'une information est perçue dans le domaine de la distraction et non de l'attention, il est plus évident qu'elle trouve une réponse inconsciente.
  • L'apprentissage naturel : le cerveau apprend des choses nouvelles, des réactions et des compréhensions nouvelles sans même qu'on ait besoin de faire l'effort de les apprendre. C'est ce qui se passe quand un enfant apprend naturellement sa langue maternelle. Il continue de l'apprendre à tout moment, même lorsqu'il joue près d'un groupe d'adulte qui discute. Ses oreilles entendent les mots, les phrases, les intonations, les interactions, les façons d’argumenter, les façons de penser des adultes. Et son cerveau prend modèle directement sur tous ces exemples plus ou moins bons pour forger ce qui constituera plus tard la façon de penser et de s'exprimer de cet individu. Et bien, lorsqu'on est distrait, le cerveau reçoit très directement des informations qu'il est capable de transformer en apprentissage.
  • Le conditionnement et le déconditionnement : c'est la même chose que l'apprentissage inconscient, mais un apprentissage spécifique. Une réaction s’associe à un déclencheur de façon automatique. Lorsque j'entends mon prénom prononcé dans la rue, je me retourne immédiatement, par réflexe. Mon prénom est conditionné à un réflexe de vigilance. Prenons un autre exemple : je veux apprendre à me détendre avant de m'endormir. J'essaie volontairement d'être calme et détendu à chaque fois que je m'allonge dans mon lit. Je veux que cela devienne un réflexe, que je me détendre automatiquement aussitôt que je m'allonge dans le lit. Il est possible que, au bout d'un moment, ça finisse par fonctionner. Mais il existe une autre façon, plus rapide de procéder. Au lieu de chercher à me détendre, à chaque fois que je me mets au lit, je me plonge totalement dans la lecture d'un roman que j'adore et qui me détend et me calme, par exemple. Dans le champ de l'inconscient, mon cerveau enregistre que le lit est toujours accompagné de détente, il « croit » qu'il y a un lien entre les deux et fabrique ce lien. Il construit un automatisme, un réflexe conditionné. Ainsi, sans même m'en rendre compte, entrer dans mon lit s'accompagnera automatiquement d'un sentiment de détente et de calme. Et lorsque, durant la journée, j'aurai une raison d'être stressé, je penserai peut-être à mon lit en me disant que ça serait si bien de pouvoir m'y allonger, dans cet endroit où je me sens si calme et détendu. Et je ne comprendrai pas forcément que c'est ce livre passionnant qui a produit cet effet. Le conditionnement comme le déconditionnement sont des phénomènes naturels qui se produisent très rapidement et fortement quand ils sont involontaires. Quand ils sont volontaires, ils demandent beaucoup plus de répétition et d'effort. C'est pourquoi la distraction permet un apprentissage inconscient et des changements de réflexe très naturels et très rapides.

Et ce ne sont que des exemples. Il existe bien d'autres phénomènes liés à la distraction.


L'art de faire diversion et l'art de la suggestion.

La distraction est un fonctionnement naturel et les phénomènes qui y sont liés nous sont parfaitement familiers et quotidiens. Certains, pourtant, ont cherché à provoquer ces phénomènes en dirigeant sciemment l'attention.
La distraction intéresse en premier lieu les psychologues depuis le XIXe siècle au moins. Et bien d'autres professions se sont penchés de très près sur ce principe pour en faire un véritable « art de distraire ». Comme nous l'avons dit déjà, les magiciens en sont sûrement les plus anciens et les plus grands maîtres. Mais plus récemment, Les psychologues se sont rapidement rendu compte qu'il était possible de communiquer littéralement avec l'inconscient d'une personne à l'intérieur du champ de la distraction. Ils ont développé des suggestions cachées, un langage à double sens (conscient-inconscient), notamment à travers les métaphores, les associations d'idées, le langage non verbal et les suggestions indirectes. Le but est d'envoyer des messages à l'inconscient d'une personne et de recevoir des réponses sans que la personne, à un niveau conscient, ne se rende compte de cette conversation parallèle. Par exemple, si un ami est triste, je peux lui demander s'il préférerai aller avec moi à la fête foraine ou aller voir un film comique passionnant au cinéma. Il est alors concentré sur le choix à faire et sur chacune des alternatives, et ne se rend pas compte que l'une et l'autre présupposent le plaisir et la joie. Le message à sont conscient, c'est que je ne sais pas choisir tout seul et qu'il doit m'aider à choisir. Le message à son inconscient, c'est qu'on remplacera la tristesse par la joie et le plaisir. Évidemment, c'est un exemple un peu basique mais qui permet de comprendre une des liens entre la distraction et la suggestion indirecte. Il en existe encore beaucoup.
Ces méthodes de communication à double niveau ont été reprises par les vendeurs (aujourd'hui appelés « commerciaux ») et aussi les politiciens. Les publicitaires ont également compris tout l'enjeu du subliminal et de communiquer les informations directement à l'inconscient sans passer par la conscience. Notamment grâce aux recherches privées financées par les grandes marques, ils ont fait progresser de façon importante la connaissance dans ce domaine. On a vu également se développer des séminaires où l'on enseigne par exemple des « techniques de séduction » basées sur les phénomènes de la distraction, des techniques de « communication efficace », etc...
L'idée est toujours plus ou moins la même : diriger l'attention d'une personne et la garder assez longtemps distraite/concentrée pour lui adresser des suggestions subliminales ou pour stimuler des réponses automatiques et des comportements inconscients.


De la distraction à l'hypnose...

Quel rapport, me direz-vous, avec l'hypnose ?
Et bien l'hypnose est une réaction naturelle qui se produit chez une personne quand sa concentration est si longtemps et/ou si intensivement maintenue sur quelque chose qu'elle entre dans un état très particulier ou le phénomène devient stable et permanent. En gros, l'hypnose, c'est une concentration qu'on ne peut plus distraire. Cet état s'appelle une dissociation.
Reprenons notre exemple de catalepsie. Normalement, ma main reste figée en l'air avec ma tasse, arrêtée sur le chemin de ma bouche, aussi longtemps que je suis absorbé par l'accident de voiture au coin de la rue. Et aussitôt que je fais à nouveau attention à mon environnement immédiat, que je me réoriente par rapport à lui, je reprends « le contrôle » de mon bras et je finis de boire ou bien je pose ma tasse. Et bien, si je développe un état d'hypnose entre temps, cela signifie que la catalepsie se sera maintenue si longtemps que je commence à me dissocier de mon corps. Mon corps, c'est déjà un peu moins « moi ». Et, une fois la distraction terminée, au lieu de « ré-intégrer » mon corps naturellement, de reprendre des mouvements normaux, je « reste bloqué un instant » dans cette dissociation. En d'autres termes, je suis resté si longtemps inattentif à mon corps qu'il a été obligé de se débrouiller tout seul et qu'il ne me laisse plus le contrôler à nouveau naturellement. On peut le comprendre. Alors je me retrouve avec une main en l'air, assez contractée pour rester figée et tenir fermement ma tasse. Si je la regarde, j'ai presque du mal à reconnaître ma main. On dirait plutôt une sorte de sculpture, posée là. Cette main qui tient la tasse, je peux la regarder et m'étonner de la voir ainsi immobile, et il me faudra quelque temps pour me dire que c'est bien « ma » main et que je peux la bouger naturellement. Il y a un retard entre le fait d'observer et le fait de reprendre le contrôle. Je suis devenu spectateur de moi-même et non plus acteur : c'est la dissociation. C'est parfois ce qu'on ressent lorsqu'on on met du temps à se réveiller le matin ou encore lorsque notre corps fait quelque chose automatiquement, par réflexe ou par habitude. On devient spectateur de ce qu'on fait et on est « en retard » sur ce qui se passe.
Et bien c'est ce retard plus ou moins long qui constitue ce qu'on appelle l' « hypnose », ou du moins son début. C'est aussi ce qui se produit sous l'effet de certaines substances dissociatives comme l'alcool ou certaines drogues. On se regarde agir. En hypnose, on se regarde plutôt « ne pas agir » car l'hypnose, si on la laisse se faire naturellement, se caractérise en général par une grande paresse et une grande économie de mouvements et d'interactions avec l'extérieur. Bref, on se coupe plus ou moins de ses interactions habituelles avec l’extérieur. Et le moment où l'on habite à nouveau son corps, son espace, son environnement, son instant, le moment où l'on redevient l'acteur complet de soi-même, c'est le moment où l'on se réveille de l'hypnose. Et lorsque je vois ma main ainsi suspendue en l'air mais que je ne suis plus que spectateur, je peux décider d'en reprendre le contrôle, ou bien décider de la laisser comme ça. Et alors, la main pourra rester suspendue ainsi très longtemps.
A ce moment là, et à ce moment là seulement, la catalepsie, phénomène naturel de la distraction devient ce qu'on appelle un « phénomène hypnotique ». En résumé, L'hypnose est une concentration stable, qui se maintient d'elle-même.


Hypnotiser.

Un des clichés de l'hypnose, c'est la méthode traditionnelle consistant à faire fixer à une personne un objet, brillant de préférence, ou un pendule, ou les yeux. Prenons l'exemple du pendule. L'hypnotiseur répète au « sujet » qu'il ne voit que le pendule, et qu'il ne peut voir que le pendule, et n'entendre que sa voix. Le champ de l'attention est donc très restreint. En effet, tant que la personne reste concentrée, elle ne fait plus attention à ce qu'il y a autour, ni aux autres sons. Il n'existe pour elle qu'un pendule à voir, et qu'une voix à entendre. Mais si l'hypnotiseur passe trop rapidement à autre chose, ou s’interrompt trop vite, il y a fort à parier que la personne fera à nouveau un usage libre de son attention : il pourra voir d'autres choses autour de lui et pourra entendre d'autres sons.
Par contre, si l'hypnotiseur insiste assez longtemps et de façon assez convaincante, il se passera un moment particulier où se développera une « transe hypnotique », c'est-à-dire que les fonctions et les perceptions restées longtemps inutiles et inhibées s'endormiront en quelque sorte et ne se réveilleront que lorsque l'hypnotiseur le demandera. L'état de sur-concentration deviendra stable. Cela signifie que l'hypnotiseur pourra demander au sujet de regarder autour de lui ; et pourtant, il ne verra rien, car la seule chose qu'il peut voir c'est le pendule. La personne est devenue littéralement aveugle de tout, sauf du pendule. Seul l'hypnotiseur pourra l'autoriser à voir telle ou telle chose en les citant précisément. L'hypnotiseur pourra lui demander ce qu'il entend ; et même si un orchestre joue à côté, même si une meute de chien aboie autour de lui, il répondra qu'il n'entend que la voix de l'hypnotiseur. Il est devenu sourd, de cette surdité toute sélective qui lui permet tout de même d'entendre la « voix de son maître » (ce que Ivan Pavlov appelle le « point vigile »). Plus besoin de « distraire » la personne pour que le phénomène naturel se maintienne. Le phénomène provoqué est devenu stable. L'hypnotiseur pourra attirer l'attention d'une personne sur l'immobilité de son corps ; et pourtant cette personne pourra observer et constater avec amusement cette immobilité sans pour autant pouvoir bouger à nouveau le corps. C'est la paralysie hypnotique, étonnamment confortable et agréable parce qu'elle s'accompagne en général, comme nous l'avons dit, d'une grande paresse intérieure.
Une autre méthode pour provoquer l'hypnose (parmi des milliers) consiste à inciter une personne à penser à une scène, ou simplement un lieu. Il peut s'agir d'un souvenir ou de quelque chose de purement imaginaire. L'hypnotiseur l'incite à s'y plonger avec tellement de détail que l'attention est toute accaparée par cette expérience de l'imagination. La personne en oublie temporairement ce qu'il y a autour d'elle, ici et maintenant. Tout comme le cancre plongé dans son souvenir de vacances. Naturellement, cet oubli devrait être temporaire. Mais l'hypnotiseur veillera à maintenir la concentration de la personne jusqu'au moment où se produit ce « blocage » qu'est l'hypnose, cette stabilité. Dans l'hypnose, cet oubli de tout ce qui n'est pas l'imagination devient alors durable et solide. La personne est totalement plongée dans son rêve. Vous pouvez alors faire autant de « perturbation » que vous voulez autour d'elle, crier, jouer de la trompette, l'appeler par son nom etc... et pourtant rien ne la distraira de son rêve. Toutefois, celui qui l'y a conduit (l'hypnotiseur) peut l'inviter à en sortir complètement et de la façon la plus agréable possible par une méthode qu'il connaît.


La qualité de l'hypnose.

Évidemment, cette stabilité est relative : la transe hypnotique varie en qualité. Dans le meilleur des cas, le phénomène hypnotique se poursuivra même si on laisse la personne seule pendant des heures dans une pièce ou qu'on tente de la perturber. Dans d'autres cas, un certain temps sans être encouragée par de nouvelles suggestions de l'hypnotiseur, ou un certain niveau de perturbations ambiantes ramèneront la personne naturellement à se contrôler et à se réveiller. Dans tous les cas, toute personne finit toujours par se réveiller, ou d'elle-même, ou parce qu'on l'y invite.

Pour que la personne reste « bloquée » dans sa concentration, on peut la maintenir longtemps et intensément concentrée jusqu'à que la dissociation se fasse toute seule et s'approfondisse. Reprenons l'exemple du pendule. On peut faire fixer le pendule très longtemps, jusqu'à ce que l'hypnose se développe d'elle -même. Chez certaines personnes ça prendra quelques minutes, chez d'autres des heures. Pour tester, on peut poser la main de la personne en l'air en catalepsie. Si on arrête le pendule, qu'on fait regarder sa main à la personne sans rien lui dire et qu'après un long moment elle est encore à l'observer avec curiosité sans en reprendre le contrôle, c'est qu'un bon état stable de dissociation a déjà commencé.
C'est d'ailleurs une excellente façon de provoquer soi-même sa propre hypnose : maintenez assez longtemps une concentration intense sur quoique ce soit de très précis et minutieux, que ce soit dans votre imagination ou autour de vous, jusqu'à ce que vous puissiez porter votre attention sur d'autres choses sans pour autant retrouver le contrôle total de vos perceptions, de vos pensées, et de vos mouvements. L'auto-hypnose, dans ce sens, est une démarche évidemment intéressante.


Un moment de distraction ou une douce et profonde hypnose ?

Hypnotiser rapidement.

La dissociation peut donc venir toute seule, à la longue, « à l'usure ». Mais on peut également utiliser des techniques de suggestion qui vont permettre d’accélérer le processus. On distrait et on utilise cette distraction pour « expliquer » à l'inconscient ce qu'on attend de lui, pour demander une dissociation. De cette façon, l'hypnose se fait beaucoup plus rapidement. On peut beaucoup plus rapidement obtenir cet état stable.
Illustrons cette technique par un petit exemple un peu simpliste et pas des plus subtiles mais, je l'espère, assez clair. Serrez la main d'un ami en même temps que vous le distrayez en lui posant des questions sur le dernier film qu'il est allé voir au cinéma. Il est obligé d'aller chercher dans sa mémoires des informations parfois lointaines pour vous répondre et cela occupera bien toute son attention, surtout si vous posez des questions précises avec une vraie curiosité naturelle. Pendant ce temps, au lieu de lâcher bêtement sa main après l'avoir serrée, vous commencez à la relâcher lentement tout en la faisant lentement glisser vers le haut. Distrait qu'il est, il ne s’aperçoit pas que sa main continue automatiquement le mouvement lent que vous lui avez donné. Sa main continue de monter lentement même quand vous l'avez lâchée totalement. Au moment où vous attirez son attention dessus, il devrait arrêter le mouvement et reprendre le contrôle de la main aussitôt. Mais au lieu d'attirer simplement son attention dessus, vous continuez de le regarder en lui demandant : « Qu'est-ce que tu préfères dans le cinéma, est-ce que c'est le fait d'être spectateur et de pouvoir prendre du plaisir à regarder ce qui se passe devant toi et découvrir comment ça se déroule sans pouvoir changer le cours du récit ? » Évidemment, il s'agit d'une première suggestion pour orienter sa pensée sur le plaisir qu'on a à observer les choses sans pouvoir intervenir et influencer par avance sa réaction. Vous pourrez ajouter : « Est-ce que tu as remarqué que, parfois, on croit qu'on peut reprendre les choses comme si de rien n'était, et pourtant on s’aperçoit qu'on préfère observer sans rien faire ? » Il se demandera un peu confus où vous voulez en venir et ne se doutera pas que vous venez simplement de reformuler une seconde fois la suggestion de « devenir avec plaisir observateur d'un phénomène ». A ce moment-là, ajoutez : « Par exemple, c'est curieux de laisser cette main monter tout seule, n'est-ce pas ? » A ce moment seulement vous orientez son regard vers sa main en la regardant vous-mêmes. Puis enchaînez sur un « je me demande jusqu'où elle peut monter comme ça. » Si vous éveillez aussi sa curiosité de savoir jusqu'où elle peut monter, il maintiendra naturellement cette dissociation pour le savoir. Ajoutez : « Je suis très jaloux de toi, on dit que plus la main monte haut, et plus on sent un calme profond se faire en soi ». Ça c'est une petite suggestion afin de donner un sens au phénomène, le lier au plaisir de l'expérience. En plus, votre ami aura d'autant plus envie de laisser les choses se continuer d'elles-mêmes. Après quoi, vous pouvez éprouver la stabilité du phénomène. Par exemple, le plus simplement du monde, en vous taisant. Et voyez combien de temps se passe sans que le processus ne s'interrompe. Il n'a plus besoin de vos suggestions pour se faire. Ou encore, vous lui dites : « Essaie de toutes tes forces de l’empêcher de monter pour voir ? » Et s'il n'y parvient pas en essayant sincèrement, c'est un signe de qualité supplémentaire de l'hypnose. Plus vous testerez cette stabilité, et plus vous aurez un indicateur de la qualité de l'hypnose induite. Utiliser un tel jeu de suggestions permet de provoquer cette stabilité hypnotique beaucoup plus rapidement qu'en attendant que ça se fasse tout seul.
Le temps nécessaire varie quand même en fonction des personnes et de l'habileté de l'hypnotiseur : entre quelques secondes et quelques heures. En moyenne quelques minutes. Et la qualité de stabilité de l'hypnose dépendra souvent du temps passé à bien approfondir et consolider cette dissociation.
Le résultat est le même, que ça soit immédiat ou que ça demande un entraînement plus progressif : l'inconscient prend le relais de la conscience et maintient l'état d'hypnose. En gros, au lieu de tenir la porte pour qu'elle reste ouverte, on peut mettre une cale dessous pour y passer plus aisément. Et c'est tout l'art de l'hypnose moderne que de :
  • provoquer une distraction,
  • la dissocier assez rapidement pour en faire de l'hypnose,
  • la stabiliser et l'approfondir,
  • ainsi, pouvoir y travailler librement (qu'il s'agisse de faire une démonstration, un test psychologique, d'enseigner quelque chose sous hypnose, ou le plus courant, de faire un travail thérapeutique sous hypnose).
Il existe pour cela un nombre considérable de méthodes dont certaines sont enseignées et il s'en développe quotidiennement de nouvelles.

Par la distraction et la suggestion, on peut faire de la thérapie aussi bien que par l'hypnose puisque l'inconscient est aussi bien « contacté ». La distraction demande que le thérapeute dirige en permanence l'attention du sujet et utilise des ruses de langage très subtiles pour glisser des suggestions cachées. L'hypnose permet d'obtenir un état où le champ de l'inconscient reste ouvert de façon permanente. Alors, l'hypnothérapeute peut faire le travail de thérapie directement, sans avoir à ruser ni à s'occuper de distraire continuellement la pensée consciente de la personne. Il peut se consacrer entièrement à la thérapie. Une fois la cale sous la porte il peut facilement faire entrer ou sortir des meubles volumineux, que sont les suggestions importantes de changement. S'il doit tenir la porte et l'ouvrir à chaque fois, c'est moins confortable.


L'hypnose est un phénomène naturel mais PAS quotidien.

On compare souvent l'hypnose au sommeil dans la mesure où, quand on dort, on maintient pendant de nombreuses heures et le plus naturellement du monde une dissociation complète (on est totalement coupé de l'environnement). Et on s'en réveille tout aussi naturellement pour se réorienter dans l'espace et dans le temps et « habiter à nouveau son corps » pour le restant de la journée. L'hypnose est une sorte d'échantillon de ce phénomène. Il est même étonnant de rencontrer encore des personnes sceptiques quant à l'hypnose, alors qu'elles-mêmes vivent toutes les nuits une très longue dissociation bien plus complète, avec hallucinations négatives et positives, distorsion du temps, amnésie, et encore d'autres phénomènes parmi les plus délicats à provoquer en hypnose. Tout le monde dort. Et toute personne capable de dormir est largement capable d'entrer dans un état d'hypnose.

Mais contrairement au sommeil, la transe (hypnotique ou autre) est une réaction assez rare. Il est rare de connaître une hypnose spontanée. La distraction est quotidienne mais, le plus généralement, une fois la distraction terminée, on reprend immédiatement et normalement une attention et une perception normales des choses. Quand sonne l'heure de la récréation, le cancre ne reste pas « bloqué » dans sa rêverie, il reconnecte naturellement avec son entourage et sort jouer comme tous ses camarades. Le fait de développer spontanément un état stable qui permet, après une longue distraction, de rester « aveugle » ou « paralysé », ou « sourd », ou « anesthésié », ou « bloqué dans un rêve » sans pouvoir reprendre sa perception normale pendant un certain temps, même court, est un phénomène heureusement rare.


L'hypnose sans transe. La confusion entre distraction, suggestion et hypnose.

Pourtant, à la suite du Dr Milton Erickson, beaucoup de personnes ont commencé à répété que l'hypnose était un état quotidien et à nommer hypnose ce qui relève de la simple distraction, comme on le disait avant. A l'origine, cette confusion était destinée à faire un parallèle légitime entre l'hypnose et la distraction, pour expliquer en quelques mots à quoi cela se rapporte. Mais avec le temps, la confusion s'est inversée, et beaucoup de gens ont commencé à définir réellement l'hypnose comme une distraction, et oublier littéralement que l'hypnose est un phénomène stable de dissociation. Certains sont allé jusqu'à nier l'existence de l'hypnose comme état stable pour ne présenter que des techniques de distraction. Certains ont commencé à dire que ce qui prouve l'hypnose, c'est le fait d'obtenir un phénomène ou une réponse inconsciente. Ca n'est pas parce qu'il y a catalepsie qu'il y a hypnose. Ca n'est pas parce qu'il y a amnésie qu'il y a hypnose. Aucun phénomène ne prouve l'hypnose, puisqu'ils sont parfaitement naturels et ordinaires et peuvent bien être stimulés par une simple suggestion, surtout accompagnée de distraction. C'est la façon dont le phénomène résiste aux perturbation qui constitue l'hypnose dans la tradition de la psychologie.
Ce qui fait l'hypnose, c'est la stabilité du phénomène et sa durée dans le temps.
Mais lorsqu'on définit l'hypnose par des réponses, alors peu importe comment arrivent ces réponses : et ainsi, le mot hypnose s'est mis à désigner de plus en plus toute technique de suggestion et de distraction permettant d'obtenir une distorsion de la perception, du contrôle, ou une réponse inconsciente.
Dans cette confusion, on n'a pourtant jamais cessé de vouloir différencier la simple distraction de l'hypnose. Certains ont renommé l'art de la distraction et de la suggestion. On a vu beaucoup de tentatives dans ce sens comme la Programmation Neuro-Linguistique, qui s'est éloignée rapidement de la notion de transe hypnotique pour privilégier les mécanismes de la suggestion, ou encore des concepts comme l'hypnose conversationnelle (dont la définition varie beaucoup selon ses pratiquants) ou encore l' « hypnose sans transe » ou bien une certaine « hypnose » du mentalisme. Il est très étonnant de voir à quel point le mot « hypnose » s'est mis à désigner des techniques sans hypnose qui utilisent simplement le même art de la suggestion que l'hypnose. A tel point que toute suggestion peut être nommée plus ou moins métaphoriquement « hypnose », ce qui est un contre-sens.
On peut utiliser la suggestion pour provoquer une hypnose plus rapidement. On peut également utiliser un état d'hypnose pour prodiguer des suggestions sans recourir à la distraction. Cependant, l'hypnose et la suggestion sont bien deux choses très différentes. L'hypnose et la rhétorique sont également deux choses très différentes, même si on peut user de rhétorique pour accompagner une personne volontaire dans l'hypnose. De la même façon, l'hypnose et la distraction sont deux choses très différentes, même si on passe par la distraction pour provoquer l'hypnose. Et mélanger ces deux termes, c'est se priver d'un langage de précision au profit d'une grande confusion intellectuelle, conceptuelle, et pratique.


Obtenir les mêmes phénomènes par la distraction et par l'hypnose.

Soyons clairs ! Sous le nom d'« hypnose », vous verrez parfois des démonstrations qui consistent à diriger continuellement l'attention de la personne, par un rythme soutenu, des bombardements de suggestions. En réalité, il s'agit de démonstrations non pas d'hypnose mais de ces phénomènes qui nous sont très ordinaires et qui sont liés à la simple distraction. Le mot hypnose est absolument usurpé pour une telle démonstration puisqu'il y a bien une distorsion de la perception mais sans recours à une véritable transe hypnotique. Si, par contre, on fait constater un phénomène au « sujet » et que celui-ci s'avère incapable d'en reprendre spontanément le contrôle, même quand on lui en laisse le temps, alors on peut commencer à appeler cela de l'hypnose. Vous voilà informés ! On ne vous trompera plus sur la marchandise. Les démonstrations de distorsion de la perception sans hypnose sont très intéressantes, impressionnantes, fascinantes, spectaculaires, etc... Mais rien ne permet de les présenter comme de l'hypnose.
Un exemple : un hypnotiseur veut faire la démonstration de la paralysie comme phénomène de la distraction. Il répétera en continu à son sujet volontaire que sa main est immobile, paralysée, etc. Puis il lui demandera d'essayer de la soulever. Mais avant même que celui-ci commence vraiment à essayer de soulever sa main, il le distraira à nouveau en lui répétant que sa main est paralysée et immobile, et ainsi de suite. La personne ne trouvera pas le temps de se concentrer assez pour retrouver sa façon habituelle de contrôler ses mouvements, et constatera qu'elle n'a pas pu bouger sa main. Il existe toutefois des façons plus subtiles de faire cette démonstration, mais c'est un exemple classique. Un hypnotiseur soucieux de faire comprendre à son public ce dont il fait la démonstration aura à cœur d'expliquer qu'il s'agit non pas d'hypnose mais de suggestion et de détournement de l'attention (« misdirection », en anglais ; dommage que nous n'ayons pas un mot aussi clair pour traduire cela).
Par contre, si l'hypnotiseur veut faire la démonstration d'une paralysie de la main comme phénomène hypnotique et non pas seulement comme phénomène de la distraction, il devra arriver à un stade ou il pourra se taire longtemps, et laisser à la personne tout le temps et tout le loisir de constater qu'elle ne peut réellement plus bouger la main. Plus longtemps il pourra laisser la personne essayer sans y parvenir, plus la transe hypnotique sera de qualité. Dans beaucoup de cas, l'hypnotiseur saura observer si la personne commence à « se réveiller » et ainsi ajouter quelques suggestions pour renforcer la dissociation, maintenir et approfondir l'hypnose.


L'anesthésie par distraction et l'anesthésie hypnotique dans l'exercice médical.

De la même façon, on a vu plus haut que l'anesthésie est un phénomène naturel de la distraction. Sous le nom d'hypnose, certains médecins anesthésistes maintiennent des patients en pleine opération chirurgicale si intensément distraits qu'ils en développent une grande anesthésie. Pour cela, ils utilisent un flot continuel de suggestions ou de métaphores. Là encore, on parle d'hypnose sans avoir la certitude que cet état caractéristique qu'on appelle hypnose joue un rôle dans le processus. Si l'anesthésiste arrêtait soudain de diriger l'attention du patient, on pourrait alors constater si ce dernier a développé une hypnose et alors l'anesthésie se maintient, ou s'il ne s'agit que d'une belle et puissante forme de distraction, au quelle cas, l'anesthésie ne survivra pas au silence, et nous pouvons plaindre le pauvre patient qui se mettra à nouveau à sentir son corps en pleine opération. C'est pourquoi cette méthode est en générale accompagnée d'une anesthésie locale chimique.
Il existe une autre façon d'utiliser l'anesthésie naturelle et c'est justement de passer par l'hypnose. Alors l'anesthésie est développée de façon si stable que l'hypnotiseur n'a pas même besoin d'être présent dans la salle d'opération. En général, l'hypnotiseur entraîne le patient à l'anesthésie hypnotique en cabinet durant plusieurs séances intensives afin que celui-ci soit capable de développer facilement, le moment venu, une belle anesthésie parfaitement stable et qui permette l'opération. La qualité de la transe hypnotique est alors primordiale puisqu'elle doit résister à la perturbation importante que constitue l'acte chirurgical. L'opération ne doit pas déranger l'hypnose.
C'est une méthode notamment très pratique pour les soins dentaires ou pour la préparation à l'accouchement. Le patient apprend à dissocier totalement et de façon stable la perception de tout son corps, ou d'une partie de son corps, jusqu'à être parfaitement à l'aise avec le fait d'anesthésier mentalement de l'intérieur une partie précise de son corps. Ainsi, il pourra « couper » les sensations de sa bouche, ou de sa main, ou d'une autre partie avant l'opération, soit par lui-même, soit sous avec l'aide de l'hypnotiseur qui l'a entraîné. Cette méthode est (hélas !) de moins en moins pratiquée parce qu'elle nécessite que l'hypnotiseur oriente sa pratique sur l'hypnose comme dissociation stable plutôt que sur l'art de la distraction permanente. Toutefois, le résultat des deux méthodes semble aussi satisfaisant. Dans les deux cas, il s'agit d'utiliser la capacité naturelle du cerveau à l'anesthésie. Et le réveil de l'opération se fait beaucoup plus facilement, sans complications. En plus de cela, l'anesthésie hypnotique s'accompagne de modifications physiologiques du membre anesthésique permettant notamment un plus faible écoulement de sang, ce qui offre plus de confort au chirurgien pour opérer.


Pour conclure...

Aujourd'hui, l'hypnotiseur moderne est une personne formée et compétente aussi bien dans l'art de la distraction et de la suggestion qu'à l'accompagnement dans l'hypnose en tant que telle. En thérapie en particulier, les personnes ont pour objectif un changement rapide et complet et qui peut souvent se faire assez facilement par la suggestion sans avoir à créer une véritable hypnose. L'avantage de l'hypnose sera la variété des approches qu'il est possible de déployer à l’intérieur de l'état stable et un grand confort de travail pour l'hypnotiseur. Ajoutons qu'une personne qui se dirige vers un hypnotiseur s'attend à vivre cette expérience très agréable, surprenante, et enrichissante qui est celle de l'hypnose.
Le mot « hypnose » est de plus en plus associé à une culture moderne de la communication à double niveau et de moins en moins à une culture de la transe hypnotique, ce qui est très dommage. La transe hypnotique a été explorée avec passion à travers les quatre derniers siècles parce qu'elle permet bien des choses que la communication, aussi subtile soit elle, n'offre pas à elle seule. Et pour beaucoup de raisons, la transe hypnotique est en elle-même une capacité naturelle qu'il est tout à fait souhaitable que chacun apprenne à développer aussi facilement et naturellement que le sommeil ; qu'il soit aussi facile pour chacun d'entrer en hypnose que de s'endormir.